Vous n'avez aucun mess@ge

Publié le par Mamzelle C

 

Bon, je ne vous ferai pas de billet de rentrée, pour vous raconter à quel point j'ai adoré retrouver tous mes petits camarades avec mon cartable Barbie et mon stylo-plume Poivre Blanc, super trendy dans les années 1990 (le seul accessoire de la marque qu'il m'ait jamais été donné de posséder, malgré mes pleurs), parce que 1/ on est pratiquement fin septembre, et que la Rentrée, c'est pas comme les étrennes, on a pas un mois complet pour en parler 2/ par ce que je suis, et comment dire ça de façon élégante, qui ne souligne pas mon désespoir ? Provisoirement sans emploi (j'insiste sur le provisoirement, c'est un genre de mantra bouddhiste, pour retrouver du travail). Je vous épargnerai mes visites passionnantes au Pôle Emploi, un lieu chaleureux, confortable grâce à ses chaises en plastique de designer (environ 8 euros chez Bureau Dépôt), accueillant par la grâce de sa machine à tickets (Numéro 43!), et surtout peuplée d'un personnel bienveillant, à l'écoute et follement compétent. Non, je vous épargnerai ça, en tout cas pour le moment, parce qu'il n'est pas exclu que je réoccupe ce blog de façon intense, à cause de mon inactivité (provisoire, bien sûr). Et que notamment, je vous abreuve de saloperies youtube et autres mèmes trouvées lors de mes errances sur Internet. Car l'Internet mondial est le lien avec la civilisation de tout chômeur (enfin de tout chômeur de moins de 30 ans, je suppose). Car pendant que tout le monde travaille, et une fois qu'on a lessivé/repeint les murs/nettoyé les placards/réaménagé son salon/mis de l'ordre dans ses papiers (et autres folles activités que l'on avait prévu de faire depuis des lustres, et que tout ce temps libre permet enfin de réaliser), on a basiquement le choix entre regarder un téléfilm de M6 (ce que je me refuse à faire, en tant qu'ancienne accro à ce type de programme), et traîner sur l'Internet mondial, entre deux candidatures spontanées.

 

 

Evidemment, à force de rafraîchir mes pages gmail et facebook 145 fois par jour, pour les trouver toujours aussi vide ( de 1/ les recruteurs appellent en général et de 2/ mes amis ont des jobs, donc des vies en dehors d'Internet), je me suis retrouvée atteinte de ce doux syndrome, dit de la "solitude accrue par les réseaux sociaux". Techniquement, rien de neuf. Vous vous souvenez quand Bridget Jones, esseulée par un énième plantage amoureux, rentrait chez elle et interrogeait son répondeur, qui lui disait « vous n'avez aucun message, rien, pas même de votre mère » ? Là c'est exactement pareil, sauf qu'il y a environ une centaine de personnes qui devraient interagir avec vous, mais votre mur reste désespérément vide. Comme si vous postiez une hilarante vidéo d'un enfant qui fait du chantage à ses parents pour avoir David Bowie dans la voiture et que personne, absolument personne ne commentait (au passage, j'aurais aimé, enfant, que mes parents me donnent le choix entre Bowie, Mc Cartney, Joni Mitchell et Nick Cave, j'aurais gagné énormément de temps pour me forger une culture musicale digne de ce nom). Vous voyez exactement ce que je veux dire, ce petit pic de déception quand vous ouvrez votre boîte mail et qu'il n'y a aucun nouveau mail dedans, même pas un spam pourri (je sais aussi que vous vous défendrez d'avoir ce sentiment, et c'est normal). Cela témoigne juste du fait que nous ne savons plus vivre sans Internet. Et pourtant, c'était un temps pas si lointain, où l'on découvrait ce monde magique de l'Internet mondial. Souvenez-vous du bruit mélodieux du modem 56k, qui agissait comme le meilleur des contrôles parentaux, en attirant immanquablement les parents dans la pièce où se trouvait l'ordinateur (à l'époque, c'était moins pour surveiller sur quels sites nous allions que pour nous enjoindre de ne pas griller les 20 heures de forfait sur le chat de Voilà). Nous étions jeunes, et nous n'avions pas d'e-mail, ni même de téléphone portable, et nous ne souffrions pas de voir nos boîtes mail vides. Car plus encore que de susciter une solitude accrue due aux réseaux sociaux, Internet a aussi développé une étrange nostalgie parmi les gens de moins de 30 ans, ceux qui ont littéralement grandi avec Internet. Avec le bruit du modem 56k, ce qui est triste, c'est qu'on peut vraiment vivre la Bohème. Non, pas celle de Puccini, mais bien celle d'Aznavour, celle qui « parle d'un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître ». Triste mais vrai. Une ère pré-Facebook, et même pré-Google, une époque où Lycos, fidèle retriever en .gif allait chercher des infos à une vitesse incroyablement rapide, qui aujourd'hui nous donnerait simplement envie de briser la box en deux et d'incendier un centre d'appel Free (s'ils n'avaient pas tous été délocalisés au Maroc). Une époque où chaque fois que nous allumions le modem, nous entrions dans un monde fabuleux et excitant et fascinant et … (principalement parce qu'on allait sur Rotten.com), et pas cet univers froid de déception et de solitude. J'en fais un peu trop ? Oui c'est vrai, je verse un peu dans le pathos. Beaucoup même. Consolez-vous en regardant des vidéos de chat, Youtube en regorge. Moi je vais rafraîchir ma page Facebook pour la 146ème fois de la journée, peut-être que quelqu'un aura laissé … oui un commentaire ! Ah non pas lui, c'est vraiment un con, il parle pour ne rien dire, d'ailleurs pourquoi il est dans mes amis...

 

Allez guys, je vous souhaite une bonne rentrée, maintenant que je vous ai tous bien déprimés avec l'idée que vous avez connu l'ère préhistorique de l'Internet, ce qui vous donne un âge canonique (moi aussi, mais j'ai eu le temps d'y réfléchir, c'est aussi ça le chômage, du temps pour penser), et comme on perd pas les bonnes habitudes, une petite chanson qui va vous réconcilier avec la vie.

 

 


 

Publié dans Septembre 2010

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